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Passer du Panama à la Colombie peut s'avérer être un casse-tête. Les informations changent constamment et ce qui était possible il y a encore 6 mois ne l'est plus forcément aujourd'hui. La zone est plutôt instable et bien que des accords de paix aient été signés avec les FARC cette région de par sa nature, la jungle, est difficilement contrôlable. Les narcotrafiquants opèrent parfois aux yeux de tous et des armes ainsi que des réfugiés désireux de rejoindre les USA transitent également par cette zone. Ceci dit, on se détend, en tant que cyclovoyageurs ou voyageurs tout court, on a rien à voir avec tout ce trafic et on ne risque à priori pas grand chose.

 

Pour se rendre en Colombie, si l'on veut faire simple, sans se prendre la tête, on peut bien sur prendre un avion depuis Panama City direction la Colombie ( pour Bogota il faut compter environ 200-300$ avec vélo). On peut aussi s'adresser à une des nombreuses agences qui proposent des charters pour se rendre à Carthagène en voilier avec passage par les San Blas pour 500-600 $ ( 5 jours en tout ).

Maintenant si l'on ne veut pas prendre d'avion et que l'on cherche à éviter les charters, il existe heureusement d'autres options.

 

Le passage terrestre à travers la jungle.

Bien qu'a priori plutôt audacieux et dangereux vu la situation de la zone, cette solution sac à dos peut réellement être envisagée. N'écartant aucune option, on s'est un peu renseigné. A ce qu'on aurait entendu, il existerait un ou plusieurs sentiers depuis Yavisa qui permettraient de rejoindre notamment Puerto Obaldia en 3-4 jours de marche . Un cycliste rencontré nous a dit qu'il existerait apparemment un bon nombre de check point militaires sur la route qui mène à Yavisa et qu'un permis serait théoriquement nécessaire pour s'aventurer dans le Darian.. Pour ce qui est des tampons, ils peuvent s'obtenir à Puerto Obaldia et Capurgana. Dans notre cas, d'un point de vue pratique, avec les vélos et pendant la saison des pluies, ça ne nous disait rien qui vaille.  Bien sûr, même avec des vélos chargés cela s'est déjà fait. C'est le cas de Claude et Françoise Hervé ( avec leur petite fille) qui relatent ce passage dans leur livre " Le tour du monde à vélo de Claude et Francoise".

 

Le passage en lancha ( bateau à moteur) en longeant la côte.

Dans ce cas le moins cher serait probablement de se rendre à Carti par la route puis d'y prendre une première lancha pour Puerto Obaldia ( environ 100 $ négociable) où l'on peut effectuer son tampon de sortie du Panama puis une autre pour Capurgana (30$) où le tampon d'entrée en Colombie s'effectue. Puis encore une autre pour Turbo (50 $) ou simplement Akandy d’où un sentier empruntable à vélo permet de rejoindre Turbo. Cela peut se faire depuis Portobello également.

Les prix sont indicatifs car ils dépendent un peu du temps que vous avez à disposition. Si vous être prêts à patienter vous aurez peut-être la chance d'être embarqué par un navire de marchandise qui alimente ces différents villages et ainsi payer moins cher.

 

 Pour notre part, l'aventure " passage en Colombie" a débuté encore bien loin de la fameuse jungle du Darian.

En effet, c'est depuis Bocas Del Toro au Panama situé sur la côte caraïbes à côté du Costa Rica, que nous avons débuté nos recherches dans l'espoir de nous rendre à terme à Carthagène des Indes et cela en effectuant du bateau stop à bord de voiliers.

 

 

Voici un récit plus ou moins complet de nos péripéties.

 

Initialement juste de passage à Bocas Del Toro, on s'est rendu compte qu'il y avait un joli paquet de voiliers, qu'il existait cinq marinas dont deux atteignables facilement et que du coup ça méritait que l'on entame quelques petites recherches.  On s'est dit que mieux valait peut-être s'y prendre ici avant d'arriver au "bout de la route" ( 680 km plus loin--> Puerto Lindo) et de se retrouver "piégés", contraints d'attendre ou de choisir une des options citées plus haut. A défaut de trouver directement une embarcation pour la Colombie, on s'est dit qu'on en trouverait peut-être une qui se rendrait à Colon ou même aux San Blas, ce qui nous rapprocherait considérablement de la Colombie. Enfin, monter à bord d'un voilier à Bocas Del Torro nous permettrait d'être très bien placés pour en trouver d'autres par la suite.  Ca nous permettrait également de nous amariner en douceur avant un plus long passage.  On s'est donc mis d'accord sur 2-3 jours de recherches puis si on obtenait aucunes réponses positives, on retournerait sur le continent et on continuerait à vélo jusqu'à Colon.

Le premier jour, on est passé dans la marina qui se trouve sur l'île principale mais qui est uniquement accessible par lancha ( 1 $) ou à la nage 500 mètres. On a fait le tour des pontons, collé deux affiches et parlé à la capitainerie du port.  Ceci fait voilà ce que l'on avait appris : les fameux catamarans qui reliaient Portobello à Carthagène pour 150 $ n'opéraient plus, qu'un immense businesse de charter était en place et qu'il nous serait difficile de le contourner. Enfin que niveau dates, on était un peu tard puisque la majorité des voiliers qui se rendaient par là-bas préféraient  février-mars-avril-mai au plus tard, les alizés y étant plus fiables et le soleil au rendez-vous ce qui rend la navigation dans les San Blas beaucoup plus évidentes ( à cause des nombreux récifs coraliens). On a aussi appris qu'il existait un "cruiser net" sur la VHF le matin à 7:00 mais que malheureusement aucun restaurant sur l'île ne possédait d'émetteur radio.

 

En parlant à d'autres personnes on a entendu parlé d'un groupe facebook nommé " Panama Cruisers" sur lequel on pouvait mettre une annonce, ce qu'on a fait. En parallèle, j'ai aussi relancé mon compte gratuit "find a crew"  sait-on jamais.

 

Le 2ème jour, on s'est rendu à la marina situé sur l'île de Caranero ( 2$ aller retour). Rebelote, tour des pontons, passage à la capitainerie et rencontre avec quelques loups de mer qui y sont allés de leur conseils. L'un nous a même passé le numéro d'un ami à lui qui était au carénage entrain de réparer son bateau avant d'aller à Colon et peut-être même en Colombie. Malheureusement cela n'a pas joué.

De retour de cette journée, on a eu l'agréable surprise de trouver deux réponses à notre publication sur la page facebook "panama cruiser". L'une venait d'une expatriée Suisse nous proposant dans l'attente de trouver un bateau de venir faire du volontariat dans sa ferme de permaculture située sur l'île. Nourris-logés contre 4h de travail par jour, sympa. L'autre venait d'une mère de famille canadienne qui avait loué les services d'un capitaine pour ramener son voilier à Colon. Les deux équipiers qui auraient du accompagner le capitaine s'étant désistés, ils en cherchaient deux autres.  On a donc pris contact, on s'est rencontré une première fois, puis deux jours plus tard on a quitté Red Frog marina à bord de " Sueno del mar" avec Hans, un skipper allemand. Pour le coup, notre expérience a servi.

Après 20 heures de navigation, on est littéralement entré dans le canal de panama en slalomant entre les cargos qui faisait la queue pour aller se mettre à quai à Shelter bay Marina. Gentiment, Susie nous a laissé profiter du bateau jusqu'à son arrivée prévue le lendemain. Hans quant à lui est parti en vitesse direction l'aéroport et nous avons donc pu nous reposer tranquillement dans le bateau et profiter des services de la marina : piscine, douches ,wifi etc…

Dans ce cas, on a même pas eu besoin de payer la nourriture. Autant dire un plan plutôt sympa.

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A Shelter bay, on s'est donné une journée pour se reposer, la nuit ayant été longue.

Le lendemain on a fait le tour de la marina, avec beaucoup d'espoir vu le nombre de voiliers présents. Malheureusement plus aucun bateau ne semblait partir dans cette direction.

 Devant quitté " Sueno del Mar" ce jour là, on avait prévu de camper aux alentours de la marina pour chercher encore 2-3 jours mais les choses se sont passées différemment. On a fait la rencontre de Paco (  dit Paco pas que con), Philippe ( le cook) et Patrick (le capitaine).

Depuis 10h ce matin, on les voyait sur la terrasse du bar entrain de tirer clope sur clope un verre à la main.  Autant dire qu'à 14h quand on les a rencontré, ils n'en menaient pas large et étaient, à part Philippe qui tenait le coup, fin bourrés. Ils n'en demeuraient pas moins super chaleureux et sympathiques.  Leur plan à eux était de partir d'ici quelques heures pour passer le canal de panama puis de délivrer le bateau, un océanis clipper de 50 pieds soit un monocoque très spacieux aux iles fidji où son propriétaire l'attendait.  Pour ce faire, il leur manquait toujours un hand-liner pour traverser le canal et on s'est donc assez facilement arrangés. Bien que partant dans la mauvaise direction, on a pas pu résister à l'envie de traverser le canal.  L'idée était que de l'autre côté, soit on trouverait un voilier qui irait en Colombie depuis le pacifique ( en réalité presque aucune chance, le seul port côté pacifique se trouve à Buenavantura, un coupe gorge selon les voileux) soit un qui repasserait le canal et qui sans s'arrêter à Shelter bay, se dirigerait vers la Colombie ou soit un voilier qui chercherait à embaucher 2 hand-liners, ce qui peut rapporter jusqu'à 100 $ la traversée par personne .

 

 Finalement, rien de tout ça ne s'est passé. Hormis le fait que le capitaine s'était vomit dessus, que Paco avait réussi l'exploit de tomber trois fois dans l'eau à la suite en voulant monter sur le bateau, le vrai problème était un manque d'organisation générale. Si j'en parle quand même, c'est parce que cela peut s'avérer être un très bon plan. Faire des aller-retours dans le canal nourri, logé et payé ( peut-être 90 plutôt que 100 $) tout en cherchant tranquillement un voilier pour la Colombie est tout a fait envisageable, qu'on ait de l'expérience ou pas. A tout cela s'ajoute bien sur l'aventure qu'est une traversée du canal de panama. On passe dans de l'eau douce, généralement on dort au milieu d'un lac habité par des crocodiles notamment. Les écluses sont parait-il impressionnantes tout comme la proximité avec les cargos. Le canal a même été réaménagé pour des Porte-conteneurs plus gros, certains transportant jusqu'à 15'000 unités.

Dans notre cas cela ne s'est pas passé car le départ pour le canal a été repoussé au lendemain puis au surlendemain et qu'entre temps, on a fini par trouver "mieux". N'empêche, ces deux jours avec nos amis français de Martinique furent vraiment sympas. Ils nous ont généreusement laissé dormir à bord allant jusqu'à nous laisser la plus grande cabine du bateau pourvu d'un lit king-size très confortable. Phillipe a cuisiné des bon petits plats chaque soir et nous a payé des coups au bar qu'on lui a bien sur rendu comme on pouvait.

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En parallèle, on a aussi rencontré Sébastien. La cinquantaine, il venait d'acquérir un voilier pour 20'000 euro à Rio Dulce au Guatemala et se dirigeait droit vers le pacifique. Prévoyant donc de traverser le canal et ne parlant pas anglais ( un impératif pour traverser le canal) il avait besoin d'aide pour remplir les formulaires, contacter un agent, grimper en haut du mât etc…. On l'a donc aidé moyennant un accès au wifi et quelques coups au bar et c'est en allant parler avec Stanley, l'agent qui s'occupe de préparer la traversée du canal, qu'on est tombé sur Nicolas. Nicolas, Français d'origine basé à San Diego aux USA, partait le lendemain matin à l'aube avec son voilier et quatre de ses amis. Leur destination, Linton bay marina à Puerto Lindo soit 35 NM plus au sud, sur la côte caraïbes.  

Toujours prêts pour rebondir et changer de plans, on a pas hésité bien longtemps et après avoir convaincu Nicolas de nous prendre avec lui, on est parti au lever du soleil de Shelter bay marina avec un ciel somptueux, les rayons du soleil se dessinant dans la lumière rose du matin.

 

 Pour le coup, on espérait que le dicton " Red in the night, Sailors delight. Red in the morning, Sailors warning ! " était faux. Allez on y croit, on se rapproche !

 

Six heures de navigation au moteur nous ont emmené à Puerto Lindo. Si de Panama City vous prenez la route direction Colon et que vous continuez ensuite le long de la côte, alors Puerto Lindo est à quelques kilomètres près, le bout de la route. En revanche dans les terres, la continuation de la panaméricaine va beaucoup plus loin et permet de se rendre à Yavisa ou Carti si on bifurque avant.

Affamés, on a commencé par se déguster un bon plat de pâtes sur les tables de la station-essence. A côté de nous, deux Colombiens bien habillés, lunettes de soleil, étaient occupés à déguster autre chose… Un petit tas de cocaïne était posé devant eux sur la table et tour à tour ils en sniffaient quelques lignes, sans se cacher le moins du monde. L'un d'entre eux était au téléphone et avec cet accent de Medellin, comme un véritable baron, il n'arrêtait pas de dire à son interlocuteur " C'est de l'argent que tu veux ? J'en ai plein d'argent, je la paye l'université à ta fille je te la paye etc…." .

Ainsi, cette marina a soudain pris à nos yeux des allures de plaque tournante car on s'est aperçus par la suite que ce n'était de loin pas les seuls qui avaient l'air bien chargés…  Ma fois, ce n'est pas la première fois que l'on côtoie ce milieu de près et cela ne nous regarde pas… ( au Mexique, on s'est notamment fait prendre en stop par des narcos-trafiquants…).

Alors que je suis en train de remplir le bidon d'eau et les gourdes, un homme descend de son trimaran au carénage et vient me parler.  Je lui explique notre plan qui est de trouver un voilier en tant qu'équipier et de nous rendre en Colombie si possible par les San Blas et cela sans payer autre chose que notre nourriture et lui se lance alors dans une explication du pourquoi ce n'est pas possible. Il affirme qu'il faut que je m'adresse à un des charter qui font la traversée, que cela me couterait entre 500 et 600 $. Sinon, il faut que je me rende à Carti par la terre pour aller y prendre une lancha etc…. J'insiste en lui disant en rigolant qu'on a une bonne étoile et qu'on finit toujours par trouver quand bien même tout le monde nous dit l'inverse. Sur quoi il me répond qu'il craint que ma bonne étoile ne s'éteigne ou ne s'éloigne quelque temps. Dans le fil de la discussion, il m'informe qu'à vrai dire , lui aussi fait partie de ce business de charter. Ceci explique donc cela…

 

Avant de chercher un abri pour la nuit, on fait une première tournée des pontons et notre surprise est grande en s'apercevant que les deux Colombiens vus à la station d'essence sont en fait propriétaires d'un voilier qui effectue des charters entre la Colombie et le Panama. Quel belle couverture…. On décline gentiment leur proposition réalisant un peu plus l'ampleur du business. Des touristes sur les couchettes, de la cocaïne dans les cales…

 

Comme on nous l'avait dit, dur de contourner le business des charters. Nombre de capitaines à qui on parle nous orientent vers des compagnies. Cependant, on fait quelques contacts, prend quelques numéros, dépose une affiche et quitte la marina en quête d'un spot pour la nuit, un peu perdus et conscients qu'il serait préférable que l'on trouve un toit pour abriter la tente vu les pluies quasi quotidiennes qui tombent ces jours. On pense d'abord camper sous un voilier au carénage mais cela n'est apparemment plus possible. On tombe alors sur Gabriel, ou devrais-je dire sur l'ange Gabriel. Cyclovoyageur et écrivain, il s'est installé à Puerto Lindo depuis quelques temps et par conséquent connait bien la région.  Il a pédalé en tout pendant une dizaine d'année, traversant notamment l'Amérique depuis chez lui en Argentine jusqu'au Canada, avant de faire sa révolution des Etats-Unis, un pays qu'il ne cesse de vanter.

Actuellement, il possède un voilier. C'est même le troisième qu'il possède. Les trois lui on été offerts (et oui pour diverses raisons, cela arrive et ce n'est pas le seul que l'on a rencontré à qui s'est arrivé… Ca fait rêver !). Loin d'être un marin, il nous raconte ses péripéties en tant que capitaine. Il y a cette fois où il a littéralement coulé au large du Cabo San Lucas en Basse-Californie et a été obligé de rejoindre la côte à la nage en ne sauvant que son passeport ainsi qu'un disque dur qu'il tenait au-dessus de sa tête . Nous ne somme pas en reste de ce côté-là et partageons les nôtres. On rigole bien, le contact est facile. Après toutes ces aventures sur les flots, il finira par conclure que selon lui : " L'eau, c'est fait pour les poissons, pas pour les humains". Fervant défenseur du socialisme face à l'impérialisme américain et athé à son départ d'Argentine, il nous raconte son changement de position après un séjour à Cuba et aux USA. En effet, un voyage de trois mois à Cuba le mènera finalement à l'écriture d'un livre dénonçant la politique castriste, ouvrant alors les yeux sur la réalité de l'hypocrisie de ces gouvernements prétendus socialistes et dira cette belle phrase " En appliquant ainsi le Socialisme, ils ont tué l'espoir". Les USA le guideront vers la religion et il se considère désormais comme un fervent catholique. Bref, un personnage haut en couleur qui nous a fait réfléchir encore bien des jours après sa rencontre. Le cœur sur la main, il tient à nous aider et nous indique un spot apparemment incroyable mais qui se trouve en haut d'une montée ultra raide. Avant qu'on s'y lance, il vient nous amener une marmite de riz aux lentilles qu'il vient de cuisiner.

Pour retrouver ce spot, c'est facile. Depuis Linton Bay marina, prenez l'unique route qui revient vers le village. Après 700 mètres la route grimpe puis redescend derrière. Là, avant d'arriver au terrain de foot, se trouve sur votre droite un bateau à moteur qu'on a sorti de l'eau et qui trône bien en évidence, style hors bord pour aller pêcher le gros. C'est là, à gauche qu'un chemin goudronné monte droit dans la jungle. Une chaine en fer aisément franchissable en barre l'accès. C'est par là qu'il faut aller.

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Gabriel ne nous avait pas menti, en haut se trouve une sorte de cabane spacieuse sans murs avec une table et un sol goudronné. Un ruisseau coule juste derrière et une vue splendide sur toute la baie fait de ce spot un de nos préférés   depuis notre départ. On y trouve des mangues, des bananes, des plantains et même des avocats. Pendant les quatre jours que l'on passera à camper là haut, on aura la visite de nombreux animaux. Des toucans, des grenouilles violettes, une tortue dans le ruisseau, un scorpion sur ma sacoche et même une biche, ce qui est plutôt rare sous ces latitudes. Régulièrement on entendra le cri des singes hurleurs bien cachés par l'épaisse canopée.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pendant ces quatre jours, on ira jusqu'à laisser nos affaires sans protection au campement pour retourner à la marina faire nos recherches. Plus on cherche, plus les prix baissent. Un Français sympathique mais lui aussi le nez tout blanc nous propose de nous emmener jusqu'à Samzouro pour 150 $ chacun et seulement 100 $ si on travaille les deux une journée pour lui. On prend note. Un charter casse ses prix et propose de nous prendre pour 300 $ chacun. Mais à nouveau, c'est à travers notre annonce sur la page facebook "panama cruiser" qu'on trouve chaussures à nos pieds. Robert, Canadien, nous invite à nous rencontrer à la station d'essence. Il se rend aux San Blas et serait intéressé à partager ce voyage avec d'autres personnes. Très vite on s'entend bien et c'est aux anges que l'on quitte le lendemain Puerto Lindo direction les fameuses San Blas ou Kuna Yala en langage indigène.

 

De tout ce qui nous a été donné de voir à travers ce voyage, l'archipel des San Blas et ces 300 îlots fait partie de ces lieux spectaculaires, isolés et tout simplement magnifiques où Robinson Crusoé se sentirait à la maison. En revanche, il serait sûrement perplexe à la vue de tout ce plastique qui même là-bas envahit les plages…

 

Sur "Fred Again 3 " on avance pas vite. Robert voulant ménager son moteur et en l'absence de vent, on avance à 2-3 kts soit 5-6 km/h mais qu'importe. Au cours de la navigation, on doit parfois slalomer entre des troncs d'arbres arrachés à la côte et des épais tapis d'algues. Partis à 10h du matin, il nous faudra 15 heures pour effectuer les 40 NM qui nous séparent de Chichimé et c'est à 01:00 qu'on jette l'ancre devant Chichimé sans pour autant l'apercevoir.

 

Avec Robert, on passe en tout 5 jours dans les San Blas. Malheureusement pour moi, suite à une mauvaise plongée réalisée à Bocas del Toro, je souffre d'une otite et la douleur atteint son paroxysme dans les San Blas me contraignant à bouffer 2 à 3 ibuprofènes 600g par jour pour calmer la douleur. Bien sûr, cela fonctionne mais je ne tarde pas à sentir des douleurs aux reins et cela n'empêche pas mon oreille de couler et de gonfler… En même temps, on se sent piègés car on apprend qu'il nous est légalement impossible de trouver un voilier pour aller en Colombie sans avoir faire le tampon de sortie du Panama et être inscrits sur la crew-list d'un voilier. A ce moment là, selon les infos que l'on nous a données, parait-il que ce ne n'est pas possible d'y faire dans les San Blas.

 

Pour ce qui est des lanchas, notre plan de secours, on a plus assez de cash.  A nous deux on a 150 $ et c'est le double qu'il nous faudrait pour nous rendre en lancha jusqu'à Turbo. Une fois de plus, petit à petit tout va rentrer dans l'ordre. A commencer par mon otite.

 Toujours à l'ancre à Chichimé, un jeune Français vient en nageant vers notre bateau. Bateau stoppeur également, il vient de traverser l'Atlantique et cherche comme nous à se rendre en Colombie. On échange quelques tuyaux et désespéré je lui demande si il n'aurait pas des antibiotiques sur son bateau. Trente minutes plus tard, il revient avec Sandrine, infirmière et qui a justement tenu à ce que la trousse de pharmacie de leur bateau soit refaite avant de quitter la France. Du coup, ils n'ont pas juste des antibiotiques à spectre large mais il ont carrément les antibiotique spécifiques pour guérir les otites à mettre en goutte dans l'oreille. Je pense qu'un médecin m'aurait prescris exactement les mêmes. Quelle chance ! Mon soulagement est immense et deux jours plus tard la douleur a déjà nettement diminué et mon oreille a désenflé. Ouf, mon étoile brille encore. Cependant, je peux dire adieu au snorkelling dans les San Blas et c'est avec une certaine jalousie que je regarde Laeti nager avec des dauphins…

Ma fois tempis, je me contente d'admirer la beauté de cette archipel hors de l'eau. Robert déborde de générosité et en bon vivant, il nous offre et nous cuisine avec plaisir la spécialité des San Blas, des langoustes qu'on vient nous livrer au bateau. Le tout arrosé d'une bouteille de vin rouge qu'il trimballe avec lui depuis le Mexique ( il n'aime pas le vin, ça tombe bien nous si ).

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Après deux jours à Chichimé, on part direction "Jesus del Corazon" dans l'espoir de pouvoir peut-être retirer de l'argent et continuer en lancha depuis là bas. Après 6 heures de navigation, changement de plan. En effet, sur un coup de tête on décide de s'arrêter sur Cayo Bandero Coco, l'image de l'île paradisiaque. A bord, on aide comme on peut, je grimpe en haut du mât pour changer une ampoule et je m'aperçoit que la drisse du Genoas est sur le point de céder. On la répare. On s'attèle ensuite à réparer les enceintes de la stéréo qui ont un problème de connexion. Bref, on fait tout ce qu'on peut pour rendre tout ce que Robert nous donne.

On fait un passage sur l'île pour s'apercevoir que tout comme Chichime, l'île est envahie de déchets. C'est triste… D'ailleurs en naviguant dans la " mer des San Blas", on en croise beaucoup qui flottent. On les rassemble en tas mais à quoi bon se demande-t-on en voyant d'autres tas bien plus vieux.

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Le lendemain matin, une sacrée surprise nous attend. Trois personnes viennent toquer à la coque en dinghie. Venant du seul voilier qu'on aperçoit à 300 mètres autour de nous, deux jeunes Allemands et un Colombien viennent nous demander de l'aide. Le Colombien se trouve être en l'occurance le Pablito de la station d'essence. Leur batterie étant à plat, ils n'ont aucun moyens de démarrer le moteur. Robert, qui est bien équipé, possède justement un chargeur de batterie prêt à l'emploi. Alors qu'il le cherche dans le bateau, Pablito nous reconnait : " Hé ! Vous seriez pas les deux cyclistes qui étaient à côté de moi à la station d'essence, du coup vous compreniez ce que je disais au téléphone ? " On rigole. Loin d'être méchant, il nous fait bien rire aussi et pour changer "il est à bloc". Ils repartent donc vers leur voilier avec le chargeur. Une heure plus tard, ils ne sont toujours pas de retour. On décide donc d'aller à leur rencontre pour récupérer le chargeur et notre surprise est grande lorsqu'on monte à bord. En effet, 10 touristes sont en train de déjeuner. Ils nous regardent un peu déconcertés avec chacun un immense plat rempli de fruits devant eux.

On remarque tout de suite que l'ambiance à bord semble tendue… Le voilier au fond n'est pas si grand et en tout ils sont quatorze à bord. Tentant notre chance, on aborde le capitaine pour lui demander si ça serait possible d'embarquer à son bord jusqu'à Cartagena. Il hésite puis finit par nous dire qu'au fond, lui ça ne le dérange pas mais qu'il faut qu'on s'adresse aux clients car eux ont payé cher leur traversée ( entre 500 et 600 $ ).  Malheureusement, une Française qui entend notre discussion ne semble pas du tout avoir envie que l'on monte à bord. J'insiste, lui disant qu'au fond ce n'est que pour deux jours, qu'on dormira par terre sur nos tapis de sol, rien à faire… (Apparement il pourrai s'arranger avec nos passports une fois arrivés…)

Pablito qui veut nous aider, nous informe qu'à El Porvenir on pourrait apparemment faire notre tampon de sortie du Panama. On décide donc de s'y rendre et on rebrousse donc chemin. Avant de partir, Laeti et Robert partent faire du snorkelling autour de l'île pendant que je pêche en vain.On arrive de nuit à El Porvenir où on jette l'ancre. Le lendemain matin, on se rend au bureau d'immigration. Malheureusement, l'officier à qui on a affaire refuse de nous faire nos tampons de sortie pour la bonne raison qu'on a pas encore trouvé d'embarcation pour quitter le Panama et que la loi exige que l'on quitte le pays trois jours maximum après avoir reçu le tampon de sortie. Possédant la liste de tous les charters qui transitent par les San Blas, il en appelle quelques uns pour savoir s'il n'y aurait pas une place pour nous. Il réussit à en joindre un et me le passe. 300 $ par personnes après négociations, c'est toujours beaucoup trop. On refuse sans savoir le moins du monde ce que l'on va faire. De surcroit, ils se mettent à embêter Robert qui nous a accompagné généreusement, en lui demandant ses papiers et s'aperçoivent que son permis de navigation acheté aux Kunas pour les San Blas est déjà expiré. Il lui demande donc de repayer 50 $ ( ou 60 ? ). Il s'en sort en leur disant qu'il avait justement prévu de quitter les San Blas aujourd'hui. 

 

Décidés à mettre un terme à cette situation qui commence à plus l'embêter qu'autre chose, lui qui nous a gentiment pris avec lui, on lui demande de nous déposer à Carti. On prévoit d'y chercher des lanchas pour nous rendre jusqu'à Turbo.. . Alors qu'on remonte dans le dinghie, je demande à Robert si ça ne serait pas possible de juste passer toquer à la coque des trois voiliers qu'on aperçoit à l'ancre non loin de nous. Les deux premiers viennent juste d'arriver de Carthagène et se dirigent vers le canal mais le troisième quant à lui se dirige vers la Colombie, Cartagène ou Santa Marta. Ravalant notre salive, sentant bien que c'est notre dernière chance de rallier la Colombie en voilier, on lance le speach et oh surprise on s'aperçoit très vite que l'idée ne semble pas trop les déranger, au contraire. Ils se concertent et on décide donc de leur dire qu'on revient d'ici deux heures pour ne pas les presser. Le capitaine est Autrichien et sa compagne Française. Ils ont quitté la France il y a 8 mois, traversé l'Atlantique puis les Caraïbes en passant par les îles vierges, Puerto Rico, Haïti, la Jamaique et j'en passe. Actuellement, ils souhaitent amener leur bateau à Santa Marta et le laisser là bas quelques mois afin de visiter les terres. Tout fraîchement arrivés des Iles Caymans, ils pensaient faire escale dans les San Blas avant de continuer sur la Colombie. Malheureusement, ils ont fait l'erreur de s'annoncer au bureau de l'immigration à El Porvenir et sont maintenant contraints de remonter à Puerto Lindo pour faire le SARP et ainsi quitter le Panama légalement.

Laeti hésite, elle qui espérait qu'on ne trainerait pas trop sur la mer, elle comprend alors que si on part avec eux ça signifie encore minimum dix jours sur l'eau puisqu'on l'on retournerait d'abord à Puerto Lindo, reviendrait ensuite dans les San Blas quelques jours pour enfin prendre le chemin de la Colombie.

 

Finalement, on décide de revenir leur parler comme prévu et notre surprise est grande quand Sandrine nous annonce qu'elle a déjà préparé notre couchette et qu'elle souhaite "bien nous accueillir". On comprend que cette fois-ci c'est différent. Contrairement à beaucoup de voiliers sur lesquels on a navigué, on sent avec eux une envie de partage. Tout comme Robert, il ne nous prennent pas car ils ont besoin d'aide mais juste pour partager un moment ensemble. Ça nous touche et nous convainc définitivement. On ne le regrettera pas. Des sept voiliers qui nous ont permis de traverser l'Atlantique, les Caraîbes ou même la mer de Cortez, ce sera de loin notre meilleure expérience. Hermann le capitaine, ( Autrichien vous vous en doutez ;) ) est super sympathique et on s'entend les quatre super bien.

Robert vient donc coller "Fred again 3 " à" Melteme 1" et on transfert nos milles sacoches et nos deux vélos.

Alors que Robert s'en va se perdre dans les San Blas, on se rappellera de lui comme une personne le cœur sur la main, aspirant à revenir à plus de simplicité et qui a décidé un beau jour de se lancer à l'aventure, tout seul. Pour l'histoire, son but est de faire le tour de l'Amérique du nord en passant plus tard par le Groenland puis à travers les eaux glacés des mers artic. 

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Ce jour-là, Hermann nous prépare des langoustes fraîchement achetées à des kunas, un régale pour changer !

De notre côté, comme c'est si souvent arrivé depuis qu'on est parti, on nage en pleine euphorie. On se remémore tout ces petits détails qui font qu'aujourd'hui on se trouve sur "Meltemé 1" avec notre ticket pour la Colombie et probablement Carthagène des Indes !

 

Le lendemain matin à l'aube on prend donc la direction de Puerto Lindo qu'on atteint après 6 heures de navigation. Pour la première fois depuis notre arrivée catastrophique à Cuba, c'est uniquement à la voile que l'on avance. Le vent est bon et Sandrine et Hermann n'utilisent presque jamais leur moteur. C'est de la triche, dit Hermann en rigolant. On est bien d'accord avec lui. Manque de chance on est samedi et on apprend très vite qu'on ne peut pas faire le SARP et nos tampons de sortie avant lundi…

On repasse alors voir Gabriel, surpris de nous voir. Le soir on passe boire une bière à la fête du village de Puerto Lindo. Des immenses enceintes sont disposées dans la rue, l'ambiance est très alcoolisée mais joyeuse.

Le lundi on se rend donc à Portobello pour faire les procédures de sorties. Tout se passe comme prévu et après avoir fait les provisions pour la suite, on regagne le bateau, passeports tamponnés !

 

Le lendemain, comme prévu, on part pour Cayo Hollandes dans les San Blas. On y reste trois nuits. L'occasion pour moi d'enfiler enfin le masque et tuba dans les San Blas, le traitement pour mon otite étant (presque) arrivé à son terme.

La nuit avant de partir, l'ancre décroche et à quelques mètre près on se retrouvait dans le sable, un classique qui fait partie de la vie sur un voilier.

 

Plus que 250 NM nous sépare désormais de Carthagène des Indes. En partant, des dauphins viennent nous souhaiter bon voyage et très vite un poisson mord à la ligne. A bord, on cuisine à tour de rôle et on prend nos quarts. Le vent malheureusement sera inexistant pendant presque la totalité du trajet nous obligeant à avancer au moteur la majorité du voyage. La nuit avant d'arriver, on se prend un orage- Le vent accélère brusquement, des éclairs tombent tout autour de nous suivit du tonnerre et de la pluie qui s'abat violemment. Ca tangue mais Hermann qui en a vu d'autres semble presque se délecter de ces instants chaotiques.

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Le 15 juillet, on aperçoit enfin la côte colombienne et quelques heures plus tard on passe à coté d'un ancien fort espagnol qui délimite l'entrée de la baie. Un quartier d'immenses gratte-ciel qu'on surnomme à Carthagène "Miami" se dresse devant nous et puis enfin on se met à quai dans la marina. On ne peut malheureusement pas y rester et on est contraint d'aller se mettre l'ancre.

La lendemain, c'est à la rame qu'on débarque en Colombie, trois petits trajets et vingt petits mois plus tard l'escargot arrive à bon port ! 

Coté argent, ces péripéties qui on duré 26 jours depuis le premier voilier à  Boccas Del Torro nous ont coûté 50 dollars P/P, essentiellement de la nourriture.

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Texte Salvador
Photo Panama
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